Les visiteurs
Nichée au centre de l’Europe, coincée entre Alpes et Jura, la Suisse ne fut, des
siècles durant, qu’un lieu de passage. On ne la trouvait pas intéressante et on
appréciait peu ses montagnes en dents de scie qui rappelaient les affres subies
par Hannibal et ses proboscidiens lors de leur épopée alpestre. Puis à la
Renaissance, Zurich, Genève et Bâle attirèrent divers théologiens et humanistes,
bien avant que la révocation de l’édit de Nantes ne fît de notre pays un havre
pour les huguenots qui, peu ou prou, contribuèrent au rayonnement de leur
nouvelle patrie.
Rousseau, en publiant « Julie ou la Nouvelle Héloïse », un des best-sellers de
l’époque, allait à son insu inciter moult visiteurs à venir à Clarens et sur les bords
du Léman, tandis que les Anglais, globe-trotteurs (globe-trotters) avant l’heure,
contribueraient à faire connaître les rivages idylliques des lacs et les cimes
enneigées qu’ils avaient aimés. Grâce à la révolution industrielle, le tourisme se
développerait et des hôtels, parfois haut de gamme, accueilleraient les touristes
venus de tous azimuts.
La Suisse peut s’enorgueillir d’avoir reçu des célébrités, tels Dostoïevski, Goethe,
Mary Shelley et Nietzsche. Victor Hugo et Hans Christian Andersen, quant à eux,
y firent plus d’un séjour. Les lettres du Français et le journal du Danois nous
renseignent sur leurs pérégrinations, de façon prolixe pour l’un, succincte pour
l’autre. Tous deux sont montés au Righi (Rigi). au château de Chillon, ils ont été
impressionnés par la basse-fosse où a croupi Bonivard (Bonnivard). Près de
Schaffhouse, Hugo, plus qu’Andersen, a été fasciné par les chutes du Rhin. et si le
diariste a aimé Genève, l’épistolier regrette entre autres les nombreuses
démolitions et écrit : « Ils auront beau « embellir » leur ville, comme ils ne
pourront jamais gratter le Salève, recrépir le mont Blanc et badigeonner le
Léman, je suis tranquille ».
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