A écrire au tableau :
● le môle
Le Port
Un port est un séjour charmant pour une âme
fatiguée des luttes de la vie. L'ampleur du ciel,
l'architecture mobile des nuages, les
colorations changeantes de la mer, le
scintillement des phares, sont un prisme
merveilleusement propre à amuser les yeux sans jamais les lasser. Les formes élancées des
navires [...] servent à entretenir dans l'âme le
goût du rythme et de la beauté. Et puis,
surtout, il y a une sorte de plaisir mystérieux et aristocratique pour celui qui n'a plus ni curiosité ni ambition, à contempler, couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle, tous ces mouvements de ceux qui partent et de ceux
qui reviennent, de ceux qui ont encore la force
de vouloir, le désir de voyager ou de s'enrichir.
Baudelaire, Le Spleen de Paris.
Orthographe - Points d'attention
- âme : Avec accent circonflexe
- changeantes : Ne pas oublier le "e" après le "g" (pour le son "j")
- phares : À ne pas confondre avec "fare"
- prisme : Avec un "s" (mot scientifique)
- merveilleusement : Double "l", terminaison en -ment
- élancées : Avec accent aigu et double "e" (accord au féminin pluriel)
- rythme : Avec un "h" et "y" (origine grecque)
- belvédère : Avec accent grave sur le second "e"
- môle : Avec accent circonflexe
Grammaire & Conjugaison
- est, sont, servent, y a, n'a plus : Verbes au présent de l'indicatif
- L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares, sont un prisme : Sujet multiple avec verbe au pluriel
- propre à amuser : Construction avec l'adjectif "propre à" suivi de l'infinitif
- sans jamais les lasser : Construction "sans" + adverbe + infinitif
- couché dans le belvédère ou accoudé sur le môle : Participes passés employés comme adjectifs, accordés avec "celui"
Le temps principal : le présent de l'indicatif
Le présent de l'indicatif est le seul temps employé dans ce texte. En français, le présent de l'indicatif s'utilise pour :
- Exprimer une action qui se déroule au moment où l'on parle
- Énoncer une vérité générale ou une caractéristique permanente
- Décrire un état durable
Astuce : Dans ce texte, Baudelaire utilise le présent à valeur générale pour décrire les caractéristiques permanentes du port et ses effets sur l'âme humaine.
Homophones potentiellement difficiles
Homophone du texte |
Pourrait être confondu avec |
Astuce |
est |
et, ai, ait |
"Est" est une forme du verbe être. "Et" est une conjonction de coordination. |
sans |
cent, sang, s'en |
"Sans" est une préposition qui marque l'absence. "Cent" est un nombre. |
ni |
n'y |
"Ni" est une conjonction de coordination négative. "N'y" est la forme élidée de "ne" + "y". |
ou |
où |
"Ou" est une conjonction de coordination exprimant l'alternative. "Où" est un adverbe de lieu. |
ces |
ses, c'est |
"Ces" est un adjectif démonstratif pluriel. "Ses" est un adjectif possessif pluriel. |
ceux |
ce, peu, yeux |
"Ceux" est un pronom démonstratif pluriel. "Ce" est un adjectif ou pronom démonstratif singulier. |
Ponctuation
- Utilisation de virgules pour les énumérations et pour isoler les appositions
- Présence de crochets [...] indiquant une coupure dans le texte original
Vocabulaire et expressions
- séjour : Lieu où l'on reste temporairement, résidence
- prisme : Objet qui décompose la lumière (au sens figuré : ce qui permet de voir les choses sous différents aspects)
- élancé : Long et mince, svelte
- belvédère : Construction ou petit pavillon élevé d'où l'on peut jouir d'une vue étendue
- môle : Jetée de pierres ou de maçonnerie construite à l'entrée d'un port pour protéger contre les vagues
- aristocratique : Qui a les caractéristiques de l'aristocratie, raffiné, distingué
Style et figures
Ce texte illustre parfaitement le style de Baudelaire dans ses poèmes en prose :
- Énumération : "L'ampleur du ciel, l'architecture mobile des nuages, les colorations changeantes de la mer, le scintillement des phares..."
- Métaphore : "un prisme merveilleusement propre à amuser les yeux"
- Personnification : "âme fatiguée"
- Antithèse : Opposition entre ceux qui sont au repos et ceux qui s'agitent
- Rythme ternaire : "la force de vouloir, le désir de voyager ou de s'enrichir"
Contexte littéraire
"Le Spleen de Paris" (ou "Petits Poèmes en prose") est un recueil posthume de poèmes en prose de Charles Baudelaire publié en 1869. Ce texte est extrait du poème "Le Port". Baudelaire y développe l'idée du port comme lieu de contemplation idéal, à la fois refuge pour l'âme lasse et point d'observation privilégié du mouvement de la vie. Cette vision du port reflète la dualité baudelairienne entre spleen (mélancolie) et idéal, entre immobilité contemplative et désir de voyage.
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