Quelle aventure !
Avec ses quelque dix mille kilomètres, la mythique route de la soie est la voie
commerciale la plus longue qu’on ait jamais construite, la plus ancienne aussi.
Ouverte au deuxième siècle avant notre ère, elle reliait l’actuelle Xi’an (Xian
Sian Si-ngan) à Antioche, en traversant l’Asie tout entière. Du courage, il en
fallait pour l’emprunter, tant étaient nombreux les écueils que l’on pouvait
rencontrer sur des pistes plus ou moins bien tracées, parfois impraticables,
franchissant les hauts massifs himalayens par des sentiers étroits qui longeaient
des précipices abrupts ou surplombaient d’impressionnantes gorges. Lesdites
pistes passaient aussi par des déserts inhospitaliers avec leurs hautes dunes ocre
de sables mouvants. L’insécurité y régnait, vu les attaques incessantes de pillards
tendant des guets-apens. Aussi les marchands se regroupaient-ils en caravanes
de cinq cents à mille chameaux et yaks (yacks) bâtés croulant sous le faix de
lourds ballots, et faisaient escale dans les différents caravansérails qui
jalonnaient la route, dans les bazars où s’échangeaient de précieuses denrées ou
dans les oasis si bienvenues.
Les Chinois, qui avaient eu la primeur de la sériciculture, élevaient intensivement
le bombyx du mûrier pour fabriquer, avec le fil de ses cocons, des soieries
chatoyantes, parfois arachnéennes dont ils s’étaient arrogé le quasi-monopole.
C’est ainsi que le crêpe, le taffetas et le brocart, très recherchés, avaient pris, les
tout premiers, le chemin de l’Occident, suivis par la porcelaine, le thé, les épices
tel le cinnamome. La myrrhe et l’encens d’Arabie, les lapis-lazuli(s) de Perse, le
vin et certains fruits et légumes voyageaient en sens inverse. Les idées, les
techniques et les religions ont aussi emprunté, bilatéralement, la route de la soie
qui fut abandonnée au quatorzième siècle, au profit de voies maritimes moins
dangereuses. Les ethnologues la redécouvrirent cinq siècles plus tard et
maintenant elle figure avec succès au programme des tour-opérateurs. |